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Alimentaire : et si c'était le moment ?

Alimentaire : et si c'était le moment ?

Les urnes ont parlé ! La 17e législature de la Ve République est profondément renouvelée, dans ses élus et dans ses équilibres. La quasi-totalité des députés qui s’étaient intéressés au sujet de l’agroalimentaire lors des derniers mandats ne sont plus là. Les dossiers en cours sont suspendus sans aucune garantie qu’ils puissent être repris : commission d’enquête parlementaire sur la souveraineté alimentaire, mission parlementaire d’évaluation d’Egalim, mission gouvernementale pour un Egalim 4, etc.

 

Tout est à rebâtir. De plus, outre que la grande majorité des députés aura à découvrir les enjeux de l’alimentaire, l’on peut craindre que le nouveau paysage n’aille pas dans le sens de la filière. Hostilité de principe à la consommation chez les uns, aux grandes entreprises parfois, au libre-échange souvent, méconnaissance de certains mécanismes économiques complexes mais également du cadre légal actuel et de leur articulation, etc. toutes orientations qui n’invitent pas à la sérénité.

La mandature qui commence aura fort à faire en dehors de l’alimentaire. Il est même permis de penser que la fragile majorité qui va se former aura bien d’autres sujets à traiter que l’alimentation. Elle pourrait alors délaisser, une fois n’est pas coutume, la filière, au profit d’autres sujets considérés comme prioritaires. Toutefois, même si l’épisode inflationniste est derrière nous, elle pourrait aussi appréhender le sujet, qui n’apparaît à l’agenda des Français que sous l’angle du pouvoir d’achat via le prisme de sa préservation avec un risque d’impact négatif sur la filière.

 

Partager la valeur

Au cours des derniers mois, le paysage institutionnel de l’alimentation a été profondément renouvelé. Changement de tête à la FNSEA il y a un an, nouvelles gouvernances à l’Association nationale des industries alimentaires comme à la Fédération du commerce et de la distribution. Nouvelle signature chez Pact’Alim.

Et si c’était le moment ? Le moment de travailler ensemble avec authenticité, loin des postures habituelles en proposant un cadre qui aurait comme seule ambition de créer de la valeur pour mieux la partager. Un cadre qui saurait combiner la loi et la soft law, pour proposer des fonctionnements innovants et vertueux, pour apprendre à s’autoréguler ? Ce ne serait certes pas un « grand soir » de la relation commerciale et de la transition alimentaire. Mais une occasion unique de sortir l’alimentation du manichéisme pour poser d’abord un diagnostic partagé de la réalité économique. Ensuite d’acter quelques principes de réalité qui doivent fonder l’action économique et la relation commerciale.

Sur la consommation et son évolution d’abord. Sur les priorités écologiques et leur urgence. Sur les enjeux économiques et de souveraineté d’une France qui s’inscrit dans l’Europe. Sur le cadre réglementaire et son articulation avec le cadre européen.

 

Politique européenne

Justement, nous avons un peu vite oublié qu’il y a moins de trois mois se tenaient des élections européennes. Le PPE est conforté en Europe, ce qui induit la poursuite d’une politique visant à uniformiser le marché et à lutter contre les spécificités nationales. De plus, la France vient de voir son poids politique diminuer au Parlement européen.

Ainsi, pour développer une souveraineté alimentaire plus protectrice de l’amont, et convaincre ses voisins de la suivre, la France devra s’appuyer sur les orientations européennes. Il sera important que celles-ci soient compatibles avec le développement économique international de la filière alimentaire.

Toutefois, les enjeux économiques de la filière en France n’attendent pas. Et si c’était le moment que la filière fasse front pour redresser sa compétitivité, fasse front pour presser l’Etat de l’y aider, et dans l’immédiat construise un dialogue interprofessionnel franc, apaisé et constructif ? Les destins sont liés. Au sein de la filière, les intérêts convergents sont prédominants sur les intérêts divergents. Il nous semble que c’est le moment pour une « grande coalition » de l’alimentaire !

 

Cette tribune est co-signée par Nicolas Genty, avocat et fondateur du cabinet Loi & Stratégies.
Une version de cette tribune est parue dans Les Echos le 28 août 2024
: https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-alimentaire-lurgence-dune-grande-coalition-2115593

Philippe Goetzmann & » est une agence conseil qui opère dans le retail, la filière alimentaire et l’économie servicielle. Nous accompagnons les dirigeants dans l’analyse des marchés, l’élaboration de la stratégie, le marketing de l’offre et les relations institutionnelles.

Philippe Goetzmann est administrateur de Ferrandi et de ESCP, préside la commission commerce de la CCI Paris Ile-de-France et est membre de l’Académie d’Agriculture de France.

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